Selon la Bible, Ézéchias régna de 716 à 687 environ avant J.-C. Son règne fut long et prospère ; Ézéchias agrandit la capitale de son royaume, Jérusalem, afin d’accueillir les nombreux Israélites venus s’installer en Juda suite à la destruction de leur royaume par les armées assyriennes vers 722. Selon les estimations archéologiques, la population de Jérusalem est passée d’environ 2 000 habitants avant la chute de Samarie en 722 av. J.-C. à environ 8 000 habitants. Ézéchias lui-même résista aux troupes assyriennes qui assiégèrent Jérusalem vers 701. Afin de résister au siège des Assyriens, il réalisa d’importants travaux pour la défense de la ville, notamment en construisant une grande muraille et un canal permettant d’accéder à la source de la ville même en cas de siège (2 Rois 20,20).
Qui était le roi Ezéchias?
Ézéchias, roi de Juda, est l’une des figures royales les plus positives de l’Ancien Testament. Il règne à Jérusalem à la fin du VIIIe siècle av. J.-C., à une époque marquée par de graves menaces politiques, notamment celle de l’empire assyrien, et par une profonde crise religieuse. Contrairement à nombre de ses prédécesseurs, Ézéchias se distingue par sa fidélité sans compromis au Dieu d’Israël.
Dès le début de son règne, il engage une réforme religieuse radicale. Il fait détruire les hauts lieux païens, brise les statues et les autels étrangers, et purifie le Temple de Jérusalem, qui avait été négligé voire profané sous les règnes précédents. Il restaure la célébration de la Pâque, centralise le culte à Jérusalem et cherche à ramener tout Juda, ainsi qu’une partie des survivants d’Israël, à l’alliance avec le Dieu unique. Ce retour à la foi des origines est salué dans les textes bibliques comme exemplaire.
Mais Ézéchias est aussi un homme d’État confronté à l’une des plus grandes crises de l’histoire de Juda. En 701 av. J.-C., l’Assyrien Sennachérib lance une campagne contre les royaumes du Levant. Après avoir dévasté plusieurs villes de Juda, l’armée assyrienne assiège Jérusalem. Ézéchias se tourne alors avec ferveur vers le prophète Isaïe, et ensemble ils prient pour la délivrance. La Bible rapporte qu’un ange intervient et frappe l’armée assyrienne, forçant Sennachérib à battre en retraite – un événement perçu comme un miracle et une confirmation éclatante de la puissance divine.
Sur le plan administratif, Ézéchias est aussi un réformateur et un bâtisseur. Il améliore la défense de Jérusalem, notamment en construisant un tunnel pour amener l’eau de la source de Guihon à l’intérieur des murailles – un ouvrage d’ingénierie encore visible aujourd’hui, connu sous le nom de tunnel d’Ézéchias. Cette réalisation montre son sens pratique et sa capacité à anticiper les sièges.
Vers la fin de sa vie, Ézéchias tombe gravement malade, mais selon le récit biblique, Dieu répond à sa prière en prolongeant sa vie de quinze années. Il reçoit cependant des émissaires de Babylone, acte qui sera critiqué par le prophète Isaïe et interprété comme une imprudence annonçant l’exil futur.

Le sceau du roi Ezéchias
Le sceau comporte trois registres : les registres supérieur et inférieur comportent des lettres hébraïques, tandis que le registre central comporte deux motifs. Il s’agit de lettres paléo-hébraïques. Voici ce que l’on peut lire sur ce sceau (rendu ici en hébreu carré)
לחזקׄיהו.אחׄ
ז.מלך.יהדׄ[ה]
Ce qui signifie : « À Ézéchias (fils de) Achaz, roi de Juda ». Or, ce roi est mentionné dans la Bible à partir du second livre des Rois, chapitre 16, verset 20 : « Achaz se coucha avec ses pères et fut enterré avec ses pères dans la cité de David. Ézéchias, son fils, régna à sa suite ». Le texte de ce sceau concorde parfaitement avec les données bibliques.
Entre les registres supérieur et inférieur, le cachet du roi Ézéchias comporte deux motifs. Or, ceux-ci sont tout droit issus de l’Égypte : la croix ansée, appelée ânkh, représente la vie dans les hiéroglyphes égyptiens ; le soleil à son zénith, bardé de rayons et doté de deux larges ailes déployées en signe de protection, est l’une des principales divinités égyptiennes connue sous le nom de Rê (« celui qui fait »), associé plus tard à Atoum, dieu solaire créateur.

Photo: E. Pastore
Que viennent donc faire ces motifs égyptiens sur le sceau du roi Ézéchias ?
Dès le IIe millénaire avant J.-C., la Palestine est sous la domination du puissant empire d’Égypte. Ainsi a-t-on retrouvé, lors de fouilles archéologiques en Égypte, la correspondance entre le pharaon Akhénaton (14è siècle avant J.-C.) et le gouverneur de Jérusalem, un certain ʿAbdi-Khéba. Un demi-siècle plus tard, le pharaon Séti Ier érige une stèle à Beth-Shean (au nord d’Israël) sur laquelle il commémore ses victoires dans la région. La domination égyptienne perdure jusqu’au 8è siècle av. J.-C., c’est-à-dire jusqu’à ce que l’empire assyrien atteigne la région de Palestine et même l’Égypte. Ainsi, du 14è au 8è siècles av. J.-C., l’influence de la civilisation égyptienne domine sur la Palestine, comme en attestent les nombreux objets égyptiens ou égyptisants découverts sur les sites archéologiques de la Palestine antique. D’ailleurs, un millénaire plus tard, au IIIe siècle avant J.-C., c’est à nouveau un pharaon, le roi grec Ptolémée II, qui règne sur la Judée.
Dans ce contexte, il n’est guère surprenant qu’un roi hébreu adopte des motifs égyptiens sur son cachet, et le cas d’Ézéchias n’est pas unique. Les alliances entre Ézéchias et l’Égypte avaient d’ailleurs été dénoncées par le prophète Isaïe: « Tu t’es fié à l’Égypte pour avoir chars et cavaliers! » (Is 36,9).
Reste qu’on est loin du culte aniconique (c’est-à-dire sans représentation du divin) prôné par certains textes bibliques, et qui ne se développera en réalité que deux siècles après Ézéchias : les fouilles archéologiques révèlent un abandon des objets cultuels domestiques, tandis que sur les cachets ne figurent plus de représentations divines.
Le prisme de Sennachérib appelé également prisme de Taylor
Sennachérib (705-681 av. J.-C.) mit le siège devant Lakish en Philistie qu’il prit ainsi que plusieurs autres cités. Après la prise de chacune de ces villes, il installa un homme de confiance comme souverain sur l’ensemble de la région. Puis il marcha sur Jérusalem. Grâce à sa préparation Ézéchias résista au siège inévitable de la cité par l’Assyrien.
Les récits dans la Bible (Is 36-37 ; 2 R 18-19) font état du siège. Certaines chroniques assyriennes citent l’évènement comme une grande victoire. L’une d’elle est une inscription monumentale laissée par Sennachérib lui-même, « Le prisme de Sennachérib » ou « prisme de Taylor », où il raconte comment, dans sa campagne contre Ézéchias, il prit 46 villes et assiégea Jérusalem qui ne tomba pas.
Le prisme de Taylor a été trouvé par le colonel Robert Taylor (1790-1852) en 1830 à Ninive, qui était l’ancienne capitale de l’empire assyrien sous Sennachérib.
Texte figurant sur le prisme :
Au cours de ma campagne j’assiégeai et je conquis les villes de Bit-Daganna, de Jaffa, de Banayabarqa et d’Azuru, villes de Çidqâ qui ne s’étaient pas promptement soumises à mes pieds, et j’y fis des prisonniers. Les gouverneurs, les nobles et les gens d’Eqrôn qui avaient mis aux fers leur roi Padî qui était lié à l’Assyrie par agrément et par serment et l’avaient livré par inimitié à Ézékias du pays de Juda, leur cœur prit peur à cause de la vilenie qu’ils avaient commise ; ils firent appel aux rois du pays d’Égypte et aux archers, aux chars et aux chevaux du roi de Meluhha, forces sans nombre, et ceux-ci vinrent à leur secours. […] J’arrivai à Eqrôn ; je tuai les gouverneurs et les nobles qui étaient cause du crime et je suspendis leurs cadavres aux tours de la périphérie de la ville ; je comptai pour prisonniers des citoyens coupables de faute et de méfait ; j’ordonnai de laisser aller ceux qui restaient, qui n’avaient pas commis de crime ni de méfait et n’étaient pas fautifs.
Je fis sortir Padî leur roi de Jérusalem, et je le fis siéger à leur tête sur le trône seigneurial et je lui imposai le tribut dû à ma souveraineté. Quant à Ézékias du pays de Juda, qui ne s’était pas soumis à mon joug, j’assiégeai et je conquis 46 villes fortes à remparts lui appartenant et les innombrables petites villes de leurs environs au moyen d’entassement de rampes et d’approche de béliers, d’attaque de fantassins, de forages, de brèches et de l’utilisation d’instruments de siège ; j’en fis sortir et comptai pour butin 200 150 personnes, petits et grands, hommes et femmes, des chevaux, des mulets, des ânes, des chameaux, des bœufs et du petit bétail sans nombre. Quant à lui, je l’enfermai dans Jérusalem sa ville royale comme un oiseau en cage ; j’érigeai contre lui des fortifications et je lui interdis de sortir par la grand-porte de la ville. Je retranchai de son pays les villes que j’avais razziées et je les donnais à Mitinti, roi d’Ashdod, à Padî, roi d’Eqrôn et à Çilbêl, roi de Gaza, et je réduisis ainsi son pays. Je leur imposai comme offrande due à ma souveraineté un tribut que j’ajoutai à la redevance antérieure qu’ils livraient annuellement. Quant à lui, Ézékias, mon éclat terrible de souverain le renversa et il envoya derrière moi à Ninive, ma ville seigneuriale, les irréguliers et les soldats d’élite qu’il avait introduits à Jérusalem, sa ville royale, pour la renforcer et qu’il avait eus comme troupe auxiliaire, avec 30 talents d’or, 800 talents d’argent, de l’antimoine de choix, des grands blocs de cornaline, des lits d’ivoire, des fauteuils d’ivoire, de la peau d’éléphant, de l’ivoire, de l’ébène, du buis, toutes sortes de choses, un lourd trésor, et ses filles, des femmes de son palais, des chanteurs, des chanteuses ; il dépêcha un sien messager à cheval pour livrer le tribut et faire acte d’allégeance.
Bibliographie : Michael Langlois, A biblical King’s Seal Found in Jerusalem.