Les représentations de femmes à la fenêtre sont des motifs artistiques importants qui offrent un aperçu fascinant de la culture et de la société dans l’Orient ancien. Ces images, souvent trouvées sur des plaques d’ivoire ornant des meubles, montrent des femmes regardant par une fenêtre. Ces représentations étaient particulièrement populaires dans l’art assyrien du premier millénaire avant J.-C. Mais quelle est leur signification?

Ces plaques décoratives en ivoire étaient des objets de luxe, finement sculptées et souvent rehaussées de feuilles d’or, de peinture et d’incrustations de pierres semi-précieuses ou de verre. Elles témoignent du haut niveau d’artisanat et de la richesse de la société assyrienne.

femme-fenetre

Placage de meuble, -800 / -700 (VIIIe s. av. J.-C.), Phénicie, Lieu de découverte : Arslan Tash, Musée du Louvre, AO 11459, Département des Antiquités orientales.

femme-fenetre-2

Maquette architecturale, -600 / -475 (Chypro-archaïque II), Lieu de découverte : Dali = Dhali = Idalion, Musée du Louvre, N III 3293, Département des Antiquités orientales

Ces objets, d’origine phénicienne ou cananéenne, témoignent de l’influence des cultures païennes sur le royaume israélite. En effet, le Premier Livre des Rois mentionne spécifiquement ce palais d’ivoire parmi les réalisations d’Achab, roi de Samarie :

Le reste des actes d’Achab, tout ce qu’il a fait, la maison d’ivoire qu’il construisit et les villes qu’il bâtit, cela n’est-il pas écrit dans le livre des Annales des rois d’Israël ? (1R 22,39)

Cette construction luxueuse dépassait même le trône d’ivoire du roi Salomon, marquant ainsi l’ambition et la richesse d’Achab. Des fouilles archéologiques à Samarie ont d’ailleurs confirmé l’existence de ce palais à Samarie et révélé de nombreux objets en ivoire, notamment :

  • Un scarabée d’ivoire

  • Une anse d’ivoire ornée d’un uræus (symbole de royauté égyptien)

  • Un manche de poignard en ivoire

  • Des plaques décoratives en ivoire, probablement utilisées pour orner les meubles

Le palais d’Achab, orné de motifs cananéens, égyptiens et orientaux, reflète l’adoption de symboles païens au cœur même du pouvoir royal à Samarie. Cette intégration d’éléments étrangers dans l’iconographie officielle du royaume démontre la profondeur du syncrétisme culturel et religieux.

Cela n’est pas sans rapport avec l’interprétation la plus courante qui est fait des représentations des « femmes à la fenêtre ». Même si sa signification précise reste sujette à débat parmi les historiens, le motif des « femmes à la fenêtre » est généralement interprété comme une représentation de la prostitution sacrée, une pratique répandue dans certains cultes de fertilité des civilisations voisines de l’Assyrie.

Dans ce sens, toutes les femmes à la fenêtre dans la Bible sont effectivement soit des prostituées, soit des personnages ennemis d’Israël:

Rahab, la prostituée : Puis elle les fit descendre avec une corde par la fenêtre, car sa maison était sur le mur du rempart ; elle habitait sur le rempart. (Jos 2,15)

La mère du général ennemi Sisera : Par la fenêtre elle se penche et elle regarde, la mère de Sisera, à travers le grillage. (Jg 5,28)

La fille de Saül qui sera rejetée par David: Or quand l’arche du SEIGNEUR entra dans la Cité de David, Mikal, fille de Saül, se pencha à la fenêtre : elle vit le roi David qui sautait et tournoyait devant le SEIGNEUR et elle le méprisa dans son cœur. (2 S 6,16)

Une femme tentatrice et adultère : Comme j’étais à ma fenêtre, j’ai regardé par le treillis. 7Je vis un de ces niais, j’aperçus, parmi les jeunes, un adolescent dénué de sens. 8Passant dans la rue marchande près du coin où elle se trouvait, il prit le chemin de sa maison. 9Que ce soit à la brune, à la tombée du jour, que ce soit au cœur de la nuit et de l’obscurité, 10voilà cette femme qui va à sa rencontre, mise comme une prostituée, séductrice. (Pr 7,6‑10)

Jézabel, la reine étrangère : Jéhu était sur le point d’entrer à Izréel, quand Jézabel l’apprit. Elle se farda les yeux, orna sa tête, puis se pencha à la fenêtre. 31Au moment où Jéhu franchissait la porte de la ville, elle dit : « Est-ce la paix, Zimri, assassin de son maître ? » 32Il leva les yeux vers la fenêtre et dit : « Qui est avec moi, qui ? » Alors deux ou trois eunuques se penchèrent vers lui. 33Il dit : « Jetez-la en bas ! » Ils la jetèrent. Une partie du sang de Jézabel gicla contre la muraille et sur les chevaux ; Jéhu la piétina. (2R 9,30‑34)

Dans la Bible, la prostitution est souvent associée au péché d’idolâtrie. Le fait d’adorer d’autres dieux que Yhwh, le Dieu d’Israël, revient à se prostituer. Tel est bien souvent le reproche que les prophètes font au peuple.

Le livre d’Ézéchiel offre une métaphore saisissante de Jérusalem, la dépeignant comme une femme infidèle à son époux divin. Cette allégorie puissante illustre la trahison spirituelle de la ville sainte (Éz 16). Le prophète accuse Jérusalem de s’être abandonnée à des liaisons dangereuses avec les nations environnantes, c’est-à-dire d’avoir mis sa confiance dans des alliances politiques plutôt que dans Yhwh.

Dans ce récit, la cité autrefois pure se livre à des débauches avec l’Égypte (Éz 16,26), les Philistins (Éz 16,27), l’Assyrie (Éz 16,28), et même la Babylonie (Éz 16,29). Ces relations illicites représentent les compromissions diplomatiques et religieuses des royaumes de Juda et d’Israël avec les puissances païennes de l’époque.

La condamnation d’Ézéchiel va au-delà d’une simple critique politique. Elle s’étend aux pratiques religieuses étrangères, en particulier à la prostitution sacrée, courante dans les cultes de fertilité des civilisations voisines. Le prophète assimile Jérusalem, jadis épouse fidèle de Yahvé, aux courtisanes sacrées des temples païens, soulignant ainsi la gravité de son apostasie.

Emanuelle Pastore

Les représentations de femmes à la fenêtre sont des motifs artistiques importants qui offrent un aperçu fascinant de la culture et de la société dans l’Orient ancien. Ces images, souvent trouvées sur des plaques d’ivoire ornant des meubles, montrent des femmes regardant par une fenêtre. Ces représentations étaient particulièrement populaires dans l’art assyrien du premier millénaire avant J.-C. Mais quelle est leur signification?

Ces plaques décoratives en ivoire étaient des objets de luxe, finement sculptées et souvent rehaussées de feuilles d’or, de peinture et d’incrustations de pierres semi-précieuses ou de verre. Elles témoignent du haut niveau d’artisanat et de la richesse de la société assyrienne.

femme-fenetre

Placage de meuble, -800 / -700 (VIIIe s. av. J.-C.), Phénicie, Lieu de découverte : Arslan Tash, Musée du Louvre, AO 11459, Département des Antiquités orientales.

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Maquette architecturale, -600 / -475 (Chypro-archaïque II), Lieu de découverte : Dali = Dhali = Idalion, Musée du Louvre, N III 3293, Département des Antiquités orientales

Ces objets, d’origine phénicienne ou cananéenne, témoignent de l’influence des cultures païennes sur le royaume israélite. En effet, le Premier Livre des Rois mentionne spécifiquement ce palais d’ivoire parmi les réalisations d’Achab, roi de Samarie :

Le reste des actes d’Achab, tout ce qu’il a fait, la maison d’ivoire qu’il construisit et les villes qu’il bâtit, cela n’est-il pas écrit dans le livre des Annales des rois d’Israël ? (1R 22,39)

Cette construction luxueuse dépassait même le trône d’ivoire du roi Salomon, marquant ainsi l’ambition et la richesse d’Achab. Des fouilles archéologiques à Samarie ont d’ailleurs confirmé l’existence de ce palais à Samarie et révélé de nombreux objets en ivoire, notamment :

  • Un scarabée d’ivoire

  • Une anse d’ivoire ornée d’un uræus (symbole de royauté égyptien)

  • Un manche de poignard en ivoire

  • Des plaques décoratives en ivoire, probablement utilisées pour orner les meubles

Le palais d’Achab, orné de motifs cananéens, égyptiens et orientaux, reflète l’adoption de symboles païens au cœur même du pouvoir royal à Samarie. Cette intégration d’éléments étrangers dans l’iconographie officielle du royaume démontre la profondeur du syncrétisme culturel et religieux.

Cela n’est pas sans rapport avec l’interprétation la plus courante qui est fait des représentations des « femmes à la fenêtre ». Même si sa signification précise reste sujette à débat parmi les historiens, le motif des « femmes à la fenêtre » est généralement interprété comme une représentation de la prostitution sacrée, une pratique répandue dans certains cultes de fertilité des civilisations voisines de l’Assyrie.

Dans ce sens, toutes les femmes à la fenêtre dans la Bible sont effectivement soit des prostituées, soit des personnages ennemis d’Israël:

Rahab, la prostituée : Puis elle les fit descendre avec une corde par la fenêtre, car sa maison était sur le mur du rempart ; elle habitait sur le rempart. (Jos 2,15)

La mère du général ennemi Sisera : Par la fenêtre elle se penche et elle regarde, la mère de Sisera, à travers le grillage. (Jg 5,28)

La fille de Saül qui sera rejetée par David: Or quand l’arche du SEIGNEUR entra dans la Cité de David, Mikal, fille de Saül, se pencha à la fenêtre : elle vit le roi David qui sautait et tournoyait devant le SEIGNEUR et elle le méprisa dans son cœur. (2 S 6,16)

Une femme tentatrice et adultère : Comme j’étais à ma fenêtre, j’ai regardé par le treillis. 7Je vis un de ces niais, j’aperçus, parmi les jeunes, un adolescent dénué de sens. 8Passant dans la rue marchande près du coin où elle se trouvait, il prit le chemin de sa maison. 9Que ce soit à la brune, à la tombée du jour, que ce soit au cœur de la nuit et de l’obscurité, 10voilà cette femme qui va à sa rencontre, mise comme une prostituée, séductrice. (Pr 7,6‑10)

Jézabel, la reine étrangère : Jéhu était sur le point d’entrer à Izréel, quand Jézabel l’apprit. Elle se farda les yeux, orna sa tête, puis se pencha à la fenêtre. 31Au moment où Jéhu franchissait la porte de la ville, elle dit : « Est-ce la paix, Zimri, assassin de son maître ? » 32Il leva les yeux vers la fenêtre et dit : « Qui est avec moi, qui ? » Alors deux ou trois eunuques se penchèrent vers lui. 33Il dit : « Jetez-la en bas ! » Ils la jetèrent. Une partie du sang de Jézabel gicla contre la muraille et sur les chevaux ; Jéhu la piétina. (2R 9,30‑34)

Dans la Bible, la prostitution est souvent associée au péché d’idolâtrie. Le fait d’adorer d’autres dieux que Yhwh, le Dieu d’Israël, revient à se prostituer. Tel est bien souvent le reproche que les prophètes font au peuple.

Le livre d’Ézéchiel offre une métaphore saisissante de Jérusalem, la dépeignant comme une femme infidèle à son époux divin. Cette allégorie puissante illustre la trahison spirituelle de la ville sainte (Éz 16). Le prophète accuse Jérusalem de s’être abandonnée à des liaisons dangereuses avec les nations environnantes, c’est-à-dire d’avoir mis sa confiance dans des alliances politiques plutôt que dans Yhwh.

Dans ce récit, la cité autrefois pure se livre à des débauches avec l’Égypte (Éz 16,26), les Philistins (Éz 16,27), l’Assyrie (Éz 16,28), et même la Babylonie (Éz 16,29). Ces relations illicites représentent les compromissions diplomatiques et religieuses des royaumes de Juda et d’Israël avec les puissances païennes de l’époque.

La condamnation d’Ézéchiel va au-delà d’une simple critique politique. Elle s’étend aux pratiques religieuses étrangères, en particulier à la prostitution sacrée, courante dans les cultes de fertilité des civilisations voisines. Le prophète assimile Jérusalem, jadis épouse fidèle de Yahvé, aux courtisanes sacrées des temples païens, soulignant ainsi la gravité de son apostasie.

Emanuelle Pastore