Sommaire

2020 Scripturae Sacrae Affectus

Lettre Apostolique du pape François à l’occasion du 16è centenaire de la mort de saint Jérôme

Une affection pour la Sainte Écriture, un amour suave et ardent pour la Parole de Dieu écrite, c’est l’héritage que saint Jérôme a laissé à l’Église à travers sa vie et ses œuvres. Les expressions tirées de la mémoire liturgique du saint nous offrent une clé de lecture indispensable pour connaître, en ce XVIème centenaire de sa mort, sa figure imposante dans l’histoire de l’Église et son grand amour pour le Christ. Cet amour se subdivise comme un fleuve en de nombreux petits ruisseaux dans son œuvre d’infatigable chercheur, traducteur, exégète, profond connaisseur et vulgarisateur passionné de la Sainte Écriture ; d’interprète raffiné des textes bibliques ; d’ardent et parfois impétueux défenseur de la vérité chrétienne ; d’ermite ascétique intransigeant et de guide spirituel expérimenté, dans sa générosité et dans sa tendresse. Aujourd’hui, mille six cents ans après, sa figure demeure d’une grande actualité pour nous chrétiens du XXIème siècle.

2019 Aperuit Illis

Motu propio du pape François pour l’institution du dimanche de la Parole de Dieu

J’établis donc que le IIIe Dimanche du Temps Ordinaire soit consacré à la célébration, à la réflexion et à la proclamation de la Parole de Dieu. Les communautés trouveront le moyen de vivre ce dimanche comme un jour solennel. Il sera important, en tout cas que, dans la célébration eucharistique, l’on puisse introduire le texte sacré, de manière à rendre évidente à l’assemblée la valeur normative que possède la Parole de Dieu. En ce dimanche, de façon particulière, il sera utile de souligner sa proclamation et d’adapter l’homélie pour mettre en évidence le service rendu à la Parole du Seigneur.

2019 Bible et vie

Discours du pape François aux participants au congrès international organisé par la Fédération Biblique Catholique

26 avril 2019

Bible et vie: engageons-nous afin que ces deux termes s’embrassent, afin que jamais l’une demeure sans l’autre. Je voudrais conclure comme j’ai commencé, par une expression de l’apôtre Paul qui, vers la fin d’une lettre, écrit: «Enfin, frères, priez pour nous». Comme lui, moi aussi, je vous demande de prier. Mais saint Paul spécifie le motif de la prière: afin «que la parole du Seigneur accomplisse sa course» (2 Th 3, 1). Prions et œuvrons afin que la Bible ne demeure pas dans une bibliothèque parmi de nombreux livres qui en parlent, mais qu’elle courre sur les routes du monde, et qu’on l’attende là où les gens vivent. Je vous souhaite d’être de bons porteurs de la Parole, avec le même enthousiasme que celui que nous lisons ces jours-ci dans les récits de Pâques, dans lesquels tous courent: les femmes, Pierre, Jean, les deux hommes d’Emmaüs… Ils courent pour rencontrer et annoncer la Parole vivante.

2019 Qu’est-ce que l’homme? Un itinéraire d’anthropologie biblique

Commission Biblique Pontificale

Le point de départ est lointain et renvoie aussi à la question qui vient du Concile Vatican II, en particulier dans «Gaudium et spes» sur la relation de l’Église dans le monde, où l’on s’interroge justement sur la société, la réalité de l’homme et l’on voit émerger cette question fondamentale sur le sens de la vie, sur l’histoire des hommes, sur ce qu’est, au fond, cette créature de Dieu faite à son image et ayant un destin – on l’espère – merveilleux. Cette interrogation, qui est ancienne, a pris aujourd’hui les dimensions d’un questionnement très aigu. Ce sont les questions sur le sens de l’origine, sur la manière dont l’homme agit, sur les valeurs et le destin qui sont les siens. Le Pape a voulu que ce thème soit abordé à partir des Écritures, qui sont le fondement et l’âme de toute réflexion chrétienne. A la base, il y a donc une question : qu’est-ce que l’homme ? Cette question parcourt l’ensemble de la Bible comme un itinéraire. Il faut une sage compréhension pour comprendre tous les différents aspects de la dimension humaine, et ne pas se concentrer sur un seul en particulier. Nous devons nous laisser guider par l’Écriture, par ses textes fondateurs, qui sont Genèse 1,3, puis par le chemin de la Bible, à travers les différentes dimensions de la sagesse, de la prophétie et de l’Évangile ; l’Écriture enseigne la vérité de l’homme.

Le premier chapitre concerne la conception de l’être humain comme «créé par Dieu», avec deux composantes : celle de la poussière, c’est-à-dire que l’homme est fait de poussière. Nous avons donc là une dimension de fragilité et de mortalité inscrite dans notre propre constitution, mais en même temps, avec un don spirituel exceptionnel qui est appelé le souffle de Dieu. C’est ainsi que le document s’attarde sur la manière dont l’Écriture parle de ces deux aspects : la fragilité de l’homme, sa faiblesse, sa peur de mourir. Et puis aussi, son extraordinaire qualité de personne semblable à Dieu, dotée du souffle de Dieu, capable de prophétie, de sagesse et ayant en lui un principe d’immortalité.

Le second chapitre explore l’homme en relation avec la Création. La Genèse dit que l’homme est placé dans un jardin. C’est ainsi que nous abordons ici les thèmes de l’alimentation avant tout, car le jardin est le lieu où l’homme se nourrit. La nutrition est, même à l’ère de la modernité, une question anthropologique très importante, à la fois en raison du manque de nourriture et parce que la nourriture d’aujourd’hui est développée dans ses composants de qualité toujours meilleure. Ensuite, il y a le thème du travail, parce que l’homme est placé dans le jardin pour travailler. Qu’est-ce que cela veut dire ? Quelle est la valeur du travail dans l’histoire de l’humanité ? Enfin, il est mis en contact avec les animaux et donc avec tout le soin de la Création, en tant que dimension de la responsabilité humaine.

Le troisième chapitre, le plus complexe, concerne la réalité relationnelle anthropologique. Dieu a placé l’homme dans le jardin et l’a créé homme et femme, la relation fondamentale d’amour qui existe et dont naissent les enfants et donc la relation qui s’établit entre parents et enfants, puis entre frères : la relation fraternelle. Ces trois dimensions de l’amour – l’amour conjugal, l’amour paternel et filial, puis l’amour fraternel – constituent, dans un certain sens, le plan que Dieu veut pour les hommes et le défi de l’Histoire pour que cela se réalise. Il est logique qu’il y ait dans ce chapitre des thèmes très importants comme le mariage, la sexualité, mais aussi le thème de la guerre, la violence et le thème des relations entre parents et enfants qui semble aujourd’hui très problématique.

Dans le quatrième chapitre, il est question de l’homme qui est soumis à la Loi, qui a un devoir à accomplir, une obéissance à poursuivre. Le document montre comment l’Ecriture parle de sa fragilité dans sa difficulté à obéir au commandement de Dieu, avec les conséquences tragiques de la désobéissance qui se développe comme sécheresse, mort et douleur. Comment Dieu intervient-il dans cette Histoire ? Avec son processus salvifique, de manière à donner cette vue d’ensemble, cette parabole de la vie de l’homme, un caractère non pas négatif mais d’y voir le triomphe de la grâce, du pardon et du salut. Ainsi, l’Histoire n’est pas une histoire de misère humaine, mais l’histoire de la gloire de Dieu dans l’homme.

2014 Inspiration et vérité de l’Écriture Sainte

Commission Biblique Pontificale

La vie de l’Église est fondée sur la Parole de Dieu. Elle est transmise par la Sainte Écriture, c’est-à-dire dans les écrits de l’Ancien et du Nouveau Testament. Selon la foi de l’Église, tous ces écrits sont inspirés, ont Dieu pour auteur — Dieu s’étant servi d’hommes choisis par lui pour leur rédaction. Du fait de leur inspiration divine, les livres bibliques communiquent la vérité. Leur valeur pour la vie et la mission de l’Église est liée à leur inspiration et à leur vérité. Des écrits qui ne proviennent pas de Dieu ne sont pas en mesure de communiquer la Parole de Dieu, et des écrits qui ne sont pas véridiques ne peuvent fonder ni animer la mission de l’Église. Cependant, la vérité présente dans les textes sacrés n’est pas toujours facile à reconnaître. On trouve parfois, au moins apparemment, des tensions entre ce qui peut être lu dans les récits bibliques et les résultats des sciences naturelles et historiques. Celles-ci semblent contredire ce qu’affirment les récits bibliques, et en mettre en doute la vérité. Il est évident que cette situation a également des implications pour la question de l’inspiration biblique : si ce qui est communiqué dans la Bible n’est pas vrai, comment Dieu peut-il en être l’auteur ? C’est à partir de ces questions que la Commission Biblique Pontificale s’est efforcée de mener une recherche sur la relation qui existe entre inspiration et vérité, et de mettre au jour la manière dont les écrits biblique eux-mêmes envisagent ces concepts.

Après avoir traité du concept d’inspiration selon le témoignage des livres bibliques, du rapport entre Dieu et les auteurs humains, et de la vérité que ces écrits nous livrent, la réflexion de la Commission Biblique s’est portée sur certaines difficultés qui posent problème d’un point de vie historique, éthique ou social. Pour répondre à ces difficultés, il est nécessaire de lire et de comprendre de manière adéquate les textes qui posent question, en tenant compte des résultats des sciences modernes, et en même temps du thème principal de ces textes, à savoir Dieu et son plan de salut. Une telle approche montre qu’il est possible de répondre aux objections qui se font jour à l’encontre de la vérité et de la provenance divine et de les dépasser.

2010 Verbum Domini

Exhortation apostolique post-synodale du pape Benoît XVI

Benoît XVI a signé, le 30 septembre 2010, mémoire de saint Jérôme, l’Exhortation Verbum Domini, sur la Parole de Dieu dans la vie et la mission de l’Église. Selon l’expression du pape, ce thème est « en un certain sens, le cœur même de la vie chrétienne, en continuité avec (…) l’Eucharistie » (VD3). Il l’a choisi « pour une redécouverte, dans la vie de l’Église, de la Parole divine (…) qu’elle devienne toujours plus le cœur de toute activité ecclésiale » (VD1). « Il n’existe pas de priorité plus grande que celle-ci : ouvrir à nouveau à l’homme d’aujourd’hui l’accès à Dieu, au Dieu qui parle et qui nous communique son amour pour que nous ayons la vie en abondance. » (VD2).

Alors, comme il s’agit d’une exhortation, le Saint-Père… exhorte : « J’exhorte les Pasteurs de l’Église et les assistants pastoraux à faire en sorte que tous les fidèles soient éduqués à goûter le sens profond de la Parole de Dieu » (VD52). Cette Exhortation est comme le fruit de « la grande impulsion que la Constitution dogmatique Dei Verbum a donnée à la redécouverte de la Parole de Dieu dans la vie de l’Église » (VD3). Le pape veut donc « renouveler la foi de l’Église dans la Parole de Dieu » (VD27). Pour lui, il s’agit d’« intensifier “la pastorale biblique” » non en la juxtaposant à d’autres formes de la pastorale, mais comme animation biblique de toute la pastorale » (VD73). Le but n’est donc pas « d’ajouter quelques rencontres dans la paroisse ou dans le diocèse, mais de s’assurer que, dans les activités habituelles des communautés chrétiennes, dans les paroisses, dans les associations et dans les mouvements, on ait vraiment à cœur la rencontre personnelle avec le Christ qui se communique à nous dans sa Parole. » Voilà de quoi nous stimuler et nous redonner vie ! Et pour grossir le trait, dans son dernier livre entretien paru cette semaine, Benoît XVI ajoute qu’« il s’agit à présent de maintenir en vie la parole de Dieu comme parole décisive ».

Notons que le titre donné à l’exhortation est aussi l’acclamation liturgique après une première ou seconde lecture : « Parole du Seigneur (Verbum Domini) ».

Le pape a construit son exhortation en trois chapitres : la Parole de Dieu, c’est-à-dire le Christ lui-même ; la Parole en Église ; la Parole pour le monde. Le plan est donc limpide. La Parole, c’est quelqu’un, le Christ ; elle nous devient familière en Église ; elle nous rend missionnaire d’elle-même, dans le monde.

2008 Bible et morale. Les racines bibliques de l’agir chrétien

Commission Biblique Pontificale

L’aspiration au bonheur, c’est-à-dire le désir d’obtenir une vie pleinement satisfaisante, s’enracine depuis toujours dans les profondeurs du cœur humain. La réalisation de ce désir dépend en grande partie de l’agir de l’individu, qui s’accorde mais souvent aussi se heurte à l’agir des autres. Comment est-ce possible de réussir à déterminer l’agir juste, celui qui mène les personnes individuelles, les communautés et, plus globalement, les nations, vers une vie réussie ou, en d’autres termes, vers le bonheur ? Pour les chrétiens, la Sainte Écriture n’est pas seulement la source de la révélation, la base de la foi, mais aussi l’incontournable point de référence de la morale. Les chrétiens sont convaincus que, dans la Bible, on peut trouver des indications et des normes pour agir correctement et pour atteindre la vie en plénitude.

À cette conviction s’opposent diverses objections. Signalons une première difficulté: le refus des normes, obligations et commandements, qui est instinctif dans la personne humaine et qui, de nos jours, est particulièrement vif. Dans la société d’aujourd’hui, deux désirs se manifestent avec une force équivalente: celui d’un bonheur plein et celui d’une liberté sans limites, c’est-à-dire le désir de pouvoir agir selon son propre jugement, dégagé de toute norme. Pour certaines personnes, cette liberté sans limites est carrément essentielle pour atteindre le vrai bonheur en plénitude. Selon cette mentalité, la dignité de la personne humaine exigerait de celle-ci qu’elle n’accepte aucune norme qui lui soit imposée de l’extérieur, mais qu’elle détermine elle-même en toute liberté et autonomie ce qu’elle tient pour juste et valable. Par conséquent, l’ensemble de normes présent dans la Bible, le développement de la Tradition ainsi que le Magistère de l’Église qui interprète et concrétise ces normes apparaissent comme des obstacles qui s’opposent au bonheur et dont il faut se libérer.

Une deuxième difficulté tient à la Sainte Écriture elle-même: les écrits bibliques ont été rédigés il y a au moins mille neuf cents ans; de plus, ils remontent à des époques lointaines où les conditions de vie étaient très différentes de celles d’aujourd’hui. Un très grand nombre de situations et de problèmes actuels sont complètement ignorés dans les écrits bibliques et, donc, on conclut qu’il est impossible d’y trouver des réponses appropriées à ces problèmes. En conséquence, même quand on reconnaît la valeur fondamentale de la Bible comme texte inspiré et normatif, il reste chez certaines personnes une attitude fortement sceptique, puisqu’on considère que la Bible ne peut pas servir à trouver les solutions à tant de problèmes actuels. L’homme d’aujourd’hui est confronté quotidiennement à des questions morales délicates que le développement des sciences humaines et la mondialisation remettent constamment sur le tapis, au point que même les croyants convaincus ont l’impression que certaines certitudes d’antan sont ébranlées.

La Commission Biblique Pontificale a donc voulu examiner le rapport entre Bible et morale, en se posant directement la question suivante: quelle valeur et quelle signification a le texte inspiré pour la morale, à une époque comme la nôtre où on ne saurait ignorer le difficultés mentionnées précédemment ?

On trouve dans la Bible beaucoup de normes, de commandements, de lois, de recueils de codes, etc. Mais une lecture attentive fait ressortir le fait que de telles normes ne sont jamais isolées, prises pour elles-mêmes ; au contraire, elles s’inscrivent toujours dans un contexte déterminé. On peut dire que, dans l’anthropologie biblique, ce qui est primordial et fondamental, c’est l’agir de Dieu qui précède celui de l’homme, les dons de sa grâce, son invitation à la communion : l’ensemble de normes est une conséquence, pour indiquer à l’homme quelle est la manière adéquate d’accueillir le don de Dieu et de le vivre. À la base de cette conception biblique, il y a la vision de la personne humaine comme Dieu l’a créée : elle n’est jamais un être isolé, autonome, détaché de tout et de tous, mais elle se situe dans un rapport radical et essentiel avec Dieu et avec la communauté des frères et sœurs. Dieu a créé l’homme à son image: l’existence même de l’homme est le don premier et fondamental qu’il a reçu de Dieu. Dans la perspective biblique, un discours sur les normes morales ne peut pas se limiter à celles-ci, considérées isolément, mais il doit toujours s’inscrire dans le contexte de la vision biblique de l’existence humaine.

La première partie du document se propose de présenter cette conception biblique caractéristique où anthropologie et théologie se compénètrent mutuellement. Suivant l’ordre canonique de la Bible, la personne humaine apparaît d’abord comme créature, à qui Dieu a donné la même vie, puis comme membre du peuple élu avec lequel Dieu a conclu une alliance particulière, et, finalement, comme frère et sœur de Jésus, le Fils de Dieu venu dans la chair.

La seconde partie du document met en évidence le fait que, dans la Sainte Écriture, on ne peut pas trouver directement des solutions aux nombreux problèmes d’aujourd’hui. La Bible, pourtant, bien qu’elle n’offre pas de solutions préfabriquées, présente des critères dont l’application aide à trouver des solutions valables pour l’agir humain. On indique, d’abord et avant tout, deux critères de base : la conformité avec la vision biblique de l’être humain et la conformité avec l’exemple de Jésus. Ensuite sont indiqués d’autres critères particuliers. De l’ensemble de la Sainte Écriture, en effet, on peut déduire au moins six lignes de force pour en arriver à des prises de position morales solides qui s’appuient sur la révélation biblique : 1) une ouverture aux diverses cultures et donc un certain universalisme éthique (critère de convergence) ; 2) une prise de position ferme contre les valeurs incompatibles (critère d’opposition) ; 3) un processus d’affinement de la conscience morale, observable à l’intérieur de chacun des deux Testaments (critère de progression) ; 4) une rectification de la tendance à reléguer les décisions morales dans la seule sphère subjective, individuelle (critère de la dimension communautaire) ; 5) une ouverture à un avenir absolu du monde et de l’histoire, susceptible de marquer en profondeur le but et la motivation de l’agir moral (critère de finalité) ; 6) une détermination fine, selon les cas, de la valeur relative ou absolue des principes et des préceptes moraux (critère du discernement).

Tous ces critères, dont la liste est représentative mais non exhaustive, sont profondément enracinés dans la Bible et leur application pourra aider le croyant : il s’agit de montrer quels sont les points que nous offre la révélation biblique pour nous aider, aujourd’hui, dans le processus délicat d’un juste discernement moral.

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2008 Le nom de Dieu

Lettre du cardinal F. Arinze aux conférences des évêques

28 juin 2008

Dans la liturgie, lorsque le Nom de Dieu, le tétragramme YHWH, apparaît, on ne le vocalise plus en disant « Yahvé » mais on le remplacera par « le Seigneur » ou Dieu, comme le Saint-Père l’a demandé depuis 2001. Les textes du Magistère romain s’appliquent à la liturgie mais on pourra par extension les appliquer aux documents de catéchèse puisqu’il s’agit de ne pas nommer l’indicible. La réalité que désigne le tétragramme le dépassant infiniment.

En 2001, « par directive du Saint-Père », la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements a déclaré : « En se conformant à une tradition immémoriale, évidente déjà dans la Septante, le nom de Dieu tout-puissant, exprimé en hébreu dans le Tétragramme, et traduit en latin par le mot Dominus, doit être rendu dans chaque langue vernaculaire par un mot de la même signification. »

Cette directive a été rappelée le 29 juin 2008 par une lettre aux conférences épiscopales et mise en pratique en octobre 2008 par le Synode des évêques sur la parole de Dieu dans la vie et la mission de l’Église. Le Tétragramme est donc traduit par « le Seigneur ».

2008 Les origines de la théologie occidentale et des racines de la culture européenne

Discours du pape Benoît XVI au monde de la culture, Collège des Bernardins, Paris

12 septembre 2008

J’aimerais vous parler ce soir des origines de la théologie occidentale et des racines de la culture européenne. J’ai mentionné en ouverture que le lieu où nous nous trouvons était emblématique. Il est lié à la culture monastique. De jeunes moines ont ici vécu pour s’initier profondément à leur vocation et pour bien vivre leur mission. Ce lieu, évoque-t-il pour nous encore quelque chose ou n’y rencontrons-nous qu’un monde désormais révolu ? Pour pouvoir répondre, nous devons réfléchir un instant sur la nature même du monachisme occidental. De quoi s’agissait-il alors ? En considérant les fruits historiques du monachisme, nous pouvons dire qu’au cours de la grande fracture culturelle, provoquée par la migration des peuples et par la formation des nouveaux ordres étatiques, les monastères furent des espaces où survécurent les trésors de l’antique culture et où, en puisant à ces derniers, se forma petit à petit une culture nouvelle. Comment cela s’est-il passé ? Quelle était la motivation des personnes qui se réunissaient en ces lieux ? Quels étaient leurs désirs ? Comment ont-elles vécu ?

2008 Le peuple juif et ses saintes Écritures dans la Bible chrétienne

Commission Biblique Pontificale

Dans son travail, la Commission Biblique ne pouvait pas faire abstraction de notre contexte actuel, où le choc de la Shoah a mis toute la question dans une autre lumière. Deux problèmes principaux se posent: les chrétiens peuvent ils, après tout ce qui est arrivé, avoir encore tranquillement la prétention d’être des héritiers légitimes de la Bible d’Israël? Ont-ils le droit de continuer à proposer une interprétation chrétienne de cette Bible ou ne doivent ils pas plutôt renoncer avec respect et humilité à une prétention qui, à la lumière de ce qui est arrivé, doit apparaître comme une usurpation? La deuxième question se rattache à la première: la façon dont le Nouveau Testament lui-même présente les Juifs et le peuple juif n’a-t-elle pas contribué à créer une hostilité contre le peuple juif, qui a fourni un appui à l’idéologie de ceux qui voulaient anéantir Israël? La Commission s’est posé ces deux questions. Il est clair qu’un rejet de l’Ancien Testament de la part des chrétiens, non seulement, comme on l’a indiqué ci-dessus, abolirait le christianisme lui-même, mais en outre ne pourrait pas favoriser la relation positive entre les chrétiens et les Juifs, car ils perdraient précisément le fondement commun. Mais ce qui doit résulter de ce qui s’est passé, c’est un nouveau respect pour l’interprétation juive de l’Ancien Testament. A ce sujet, le Document dit deux choses. D’abord, il déclare que « la lecture juive de la Bible est une lecture possible, qui se trouve en continuité avec les Saintes Écritures juives de l’époque du second Temple, une lecture analogue à la lecture chrétienne, laquelle s’est développée parallèlement » (no 22). Il ajoute que les chrétiens peuvent apprendre beaucoup de l’exégèse juive pratiquée depuis plus de 2000 ans; en retour, les chrétiens peuvent espérer que les Juifs pourront tirer profit des recherches de l’exégèse chrétienne (ibid.). Je pense que ces analyses seront de grande utilité pour la poursuite du dialogue judéo-chrétien, ainsi que pour la formation intérieure de la conscience de soi chrétienne.

La question de la façon dont les Juifs sont présentés dans le Nouveau Testament est traitée dans la dernière partie du Document; les textes « anti judaïques » y sont soigneusement éclairés. Ici, je voudrais seulement souligner un aspect qui me paraît spécialement important. Le Document montre que les reproches adressés aux Juifs dans le Nouveau Testament ne sont ni plus fréquents ni plus virulents que les accusations contre Israël dans la Loi et les prophètes, donc à l’intérieur de l’Ancien Testament lui-même (no 87). Ils appartiennent au langage prophétique de l’Ancien Testament et sont donc à interpréter comme les oracles des prophètes: ils mettent en garde contre des égarements contemporains, mais ils sont toujours essentiellement temporaires et laissent aussi toujours prévoir de nouvelles possibilités de salut.

1997 L’enracinement de Jésus dans le Judaïsme

Discours du pape Jean Paul II à la Commission Biblique Pontificale

11 avril 1997

On ne peut exprimer pleinement le mystère du Christ sans recourir à l’Ancien Testament. L’identité humaine de Jésus se définit à partir de son lien avec le peuple d’Israël, avec la dynastie de David et la descendance d’Abraham. Et il ne s’agit pas seulement d’une appartenance physique. En prenant part aux célébrations dans la synagogue où étaient lus et commentés les textes de l’Ancien Testament, Jésus prenait aussi humainement conscience de ces textes, il nourrissait son esprit et son cœur de ces textes, s’en servant ensuite dans sa prière et s’en inspirant dans son comportement.

Il est devenu ainsi un authentique fils d’Israël, profondément enraciné dans la longue histoire de son peuple. Quand il a commencé à prêcher et à enseigner, il a puisé abondamment dans le trésor des Écritures, enrichissant ce trésor d’inspirations nouvelles et d’initiatives inattendues. Celles-ci – notons-le – ne visaient pas à abolir l’ancienne révélation, mais, bien au contraire, à l’amener à son accomplissement parfait.

1997 L’interprétation de la Bible dans l’Église

Commission Biblique Pontificale

La découverte des manuscrits de Qumrân éclairait d’un jour nouveau un grand nombre de problèmes bibliques et ouvrait d’autres champs de recherches. Depuis, beaucoup de découvertes ont été faites et de nouvelles méthodes d’investigation et d’analyse ont été mises au point. C’est ce changement de situation qui a rendu nécessaire un nouvel examen des problèmes. La Commission Biblique pontificale s’est attelée à cette tâche et présente aujourd’hui le fruit de son travail, intitulé « L’interprétation de la Bible dans l’Église ».

Ce qui frappera à première vue dans ce document, c’est l’ouverture d’esprit dans lequel il est conçu. Les méthodes, les approches et les lectures pratiquées aujourd’hui dans l’exégèse sont examinées et, malgré quelques réserves parfois graves qu’il est nécessaire d’exprimer, l’on admet, dans presque chacune d’elles, la présence d’éléments valables pour une interprétation intégrale du texte biblique.

Car l’exégèse catholique n’a pas une méthode d’interprétation propre et exclusive, mais, en commençant par la base historico-critique, dégagée de présupposés philosophiques ou autres contraires à la vérité de notre foi, elle met à profit toutes les méthodes actuelles, en cherchant dans chacune la « semence du Verbe ».

Un autre trait caractéristique de cette synthèse est son équilibre et sa modération. Dans son interprétation de la Bible, elle sait harmoniser la diachronie et la synchronie, en reconnaissant que les deux se complètent et sont indispensables pour faire ressortir toute la vérité du texte et pour donner satisfaction aux légitimes exigences du lecteur moderne.

Plus important encore, l’exégèse catholique n’attache pas son attention aux seuls aspects humains de la révélation biblique, ce qui est parfois le tort de la méthode historico-critique, ni aux seuls aspects divins, comme le veut le fondamentalisme ; elle s’efforce de mettre en lumière les uns et les autres, unis dans la divine « condescendance », qui est à la base de toute l’Écriture.

On pourra enfin percevoir l’accent mis dans ce document sur le fait que la Parole biblique agissante s’adresse universellement, dans le temps et dans l’espace, à toute l’humanité. Si « les paroles de Dieu… se sont faites semblables au langage humain », c’est pour être entendues par tous. Elles ne doivent pas rester lointaines, « au-delà de tes moyens ni hors de ton atteinte. … Car la Parole est tout près de toi, elle est dans ta bouche et dans ton cœur pour que tu la mettes en pratique ». Tel est le but de l’interprétation de la Bible. Si la tâche première de l’exégèse est d’atteindre le sens authentique du texte sacré ou même ses différents sens, il faut ensuite qu’elle communique ce sens au destinataire de l’Écriture Sainte qui est, si possible, toute personne humaine.

1993 Centenaire de l’encyclique Providentissimus Deus et du cinquantenaire de l’encyclique Divino Afflante Spiritu

Discours du pape Jean Paul II

23 avril 1993

La Bible exerce son influence au cours des siècles. Un processus constant d’actualisation adapte l’interprétation à la mentalité et au langage contemporains. Le caractère concret et immédiat du langage biblique facilite grandement cette adaptation, mais son enracinement dans une culture ancienne provoque plus d’une difficulté. Il faut donc sans cesse retraduire la pensée biblique dans le langage contemporain, pour qu’elle soit exprimée d’une manière adaptée aux auditeurs. Cette traduction doit cependant être fidèle à l’original, et ne peut pas forcer les textes pour les accommoder à une lecture ou à une approche en vogue à un moment donné. Il faut montrer tout l’éclat de la parole de Dieu, même si elle est « exprimée en paroles humaines ».

La Bible est diffusée aujourd’hui sur tous les continents et dans toutes les nations. Mais pour que son action soit profonde, il faut qu’il y ait une inculturation selon le génie propre à chaque peuple. Peut-être les nations moins marquées par les déviances de la civilisation occidentale moderne comprendront elles plus facilement le message biblique que celles qui sont déjà comme insensibles à l’action de la parole de Dieu à cause de la sécularisation et des excès de la démythologisation.

En notre temps, un grand effort est nécessaire, non seulement de la part des savants et des prédicateurs, mais aussi des vulgarisateurs de la pensée biblique: ils doivent utiliser tous les moyens possibles – et il y en a beaucoup aujourd’hui – pour que la portée universelle du message biblique soit largement reconnue et que son efficacité salvifique puisse se manifester partout.

1979 Les rapports entre la culture et la Révélation dans les études bibliques

Discours du pape Jean Paul II à la Commission Biblique Pontificale

26 avril 1979

Les différentes cultures sont capables d’être les véhicules de la Parole de Dieu, parce que se trouve inséré en elles quelque chose de très positif, qui est déjà une présence en germe du Logos divin. De même, aujourd’hui, l’annonce de l’Église ne craint pas de se servir des expressions culturelles contemporaines: ainsi sont-elles, par une certaine analogie avec l’humanité du Christ, appelées pour ainsi dire à participer à la dignité du Verbe divin lui-même. Pourtant, on voit se manifester aussi le caractère purement instrumental des cultures qui, sous l’influence d’une évolution historique très marquée, sont soumises à de fortes mutations. Préciser les rapports existants entre les variations de la culture et la constante de la révélation est justement la tâche, ardue mais exaltante, des études bibliques comme de toute la vie de l’Église.

1965 Dei Verbum

Constitution dogmatique sur la révélation divine

Trois facteurs ont contribué à l’élaboration d’une Constitution sur la Révélation. Le premier relève d’une nouvelle compréhension du phénomène de la Tradition qui, pour diverses raisons, s’est peu à peu élaborée à partir du siècle dernier…. Le deuxième facteur déterminant pour la rédaction de cette Constitution est lié à l’application de la méthode historico-critique en exégèse et aux répercussions théologiques de cette pratique…. Le troisième facteur décisif est le plus positif : il est en rapport avec le mouvement biblique qui, depuis le début du siècle, n’a cessé de prendre de l’ampleur, suscitant dans une large portion du monde catholique une attitude nouvelle à l’égard de l’Écriture Sainte, et par là même une meilleure connaissance et un recours toujours plus résolu à ses enseignements dans les domaines de la théologie et de la piété. Comme cela avait déjà été le cas avec le mouvement liturgique, une réalité spirituelle nouvelle a émergé dans les décennies avant le Concile, que le Concile n’eut qu’à reprendre, à approfondir et à étendre à toute l’Église (dans la mesure où cela relève du pouvoir d’un Concile).

LA CONSTITUTION DEI VERBUM

I. La nature de la révélation

La Révélation ne se concentre pas sur la manifestation de « quelque chose » – d’une série de vérités – mais de « Quelqu’un » qui se manifeste pour entrer en communion avec l’homme.

Le chapitre explique la sollicitude de Dieu qui, au fil des siècles, a préparé la voie à l’Évangile. C’est ainsi qu’il s’est révélé à nous depuis nos premiers parents jusqu’à l’étape finale où il nous a parlé à travers le Fils. Par conséquent, nous n’avons plus à attendre une autre Révélation publique avant la manifestation glorieuse de Jésus-Christ. Il est le médiateur et la plénitude de toute la Révélation.

Dieu se révèle pour sauver l’homme, pour le faire participer à son amitié et à sa compagnie. C’est le sens de la Révélation.

II. la transmission de la Révélation divine

Dieu a voulu que ce qu’il avait révélé soit transmis dans son intégralité pour tous les temps. C’est pourquoi il a ordonné aux apôtres de prêcher l’Évangile à tous les hommes. Ce chapitre explique d’abord ce qu’est la Tradition et traite ensuite de sa relation avec l’Écriture Sainte. Il met également en évidence le caractère unique du dépôt de la Révélation sous ses deux formes : La Sainte Tradition et la Sainte Écriture, qui constituent ensemble le dépôt sacré de la Parole de Dieu.

Il fait également référence au Magistère de l’Église, dont il explique qu’il n’est pas au-dessus de la révélation, mais qu’il a pour fonction d’interpréter avec autorité la parole de Dieu, orale ou écrite. Ainsi, la Tradition, l’Écriture et le Magistère de l’Église sont unis et liés, de sorte qu’aucun ne peut exister sans les autres.

III. L’inspiration divine et l’interprétation des Saintes Écritures

Dei Verbum insiste sur le fait que l’action de l’Esprit Saint a agi à travers les auteurs humains pour garantir que tout et seulement ce que Dieu a voulu soit écrit.

Dieu, dans son admirable condescendance, parle dans l’Écriture à travers les hommes et dans un langage humain, et il appartient à l’interprète de l’Écriture d’étudier soigneusement ce que les auteurs ont voulu dire et ce que Dieu a voulu faire connaître par ces mots. Afin de clarifier ces concepts, le troisième chapitre explorera ce double effort de compréhension que l’Église doit fournir pour découvrir le véritable sens du texte sacré.

IV. L’Ancien Testament

Ce quatrième chapitre retrace le processus historique, contenu dans l’Ancien Testament, par lequel Dieu prépare le salut de l’humanité. Il affirme également l’importance de l’Ancien Testament car il contient des enseignements sublimes sur Dieu, renferme des trésors de prière et recèle le mystère de notre salut. Enfin, il aborde la relation entre l’Ancien et le Nouveau Testament, défendant l’unité entre les deux.

V. Le Nouveau Testament

La Parole de Dieu se trouve dans le Nouveau Testament qui, en plus des quatre Évangiles, comprend les lettres de Paul et d’autres écrits apostoliques inspirés par le Saint-Esprit. Ce cinquième chapitre commence par déclarer l’excellence du Nouveau Testament, en mentionnant particulièrement les quatre évangiles.

Elle poursuit en défendant résolument l’historicité des Évangiles :  » La Sainte Mère l’Église a toujours et partout défendu avec fermeté et la plus grande constance que les quatre Évangiles mentionnés, dont elle affirme sans doute l’historicité, racontent fidèlement ce que Jésus, le Fils de Dieu, vivant parmi les hommes, a réellement fait et enseigné pour leur salut éternel jusqu’au jour de son ascension « .

VI. L’Écriture Sainte dans la vie de l’Église

Le sixième et dernier chapitre commence par rappeler la vénération que l’Église a toujours eue pour les Saintes Écritures et l’importance de conserver des traductions soignées. À cet égard, il approuve la traduction de l’Ancien Testament dite des Soixante-dix, tout en honorant les autres traductions orientales et latines, dont la Vulgate.

Il évoque ensuite les devoirs des exégètes et des théologiens dans l’étude et l’explication des Saintes Écritures, et conclut en recommandant avec insistance à tous les fidèles, en particulier au clergé, une lecture assidue de l’Écriture, car  » ignorer l’Écriture, c’est ignorer le Christ « .

1943 Divino Afflante Spiritu

Lettre encyclique du Pape Pie XII

Divino afflante Spiritu se préoccupe de défendre l’interprétation catholique contre les attaques qui s’opposent à l’utilisation de la science par les exégètes et qui veulent imposer une interprétation non scientifique, dite « spirituelle », des Saintes Ecritures.

Divino afflante Spiritu était publiée peu de temps après une polémique menée, surtout en Italie, contre l’étude scientifique de la Bible. Un opuscule anonyme avait été largement diffusé pour mettre en garde contre ce qu’il décrivait comme « un très grave danger pour l’Église et pour les âmes: le système critico-scientifique dans l’étude et l’interprétation de la Sainte Ecriture, ses déviations funestes et ses aberrations ».

Dans Divino afflante Spiritu, le Pape Pie XII peut constater la fécondité des directives données par Providentissimus Deus: « Grâce à une meilleure connaissance des langues bibliques et de tout ce qui concerne l’Orient, …un bon nombre des questions soulevées au temps de Léon XIII contre l’authenticité, l’antiquité, l’intégrité et la valeur historique des Saints Livres… se trouvent aujourd’hui débrouillées et résolues ». Le travail des exégètes catholiques, « qui ont fait un usage correct des armes intellectuelles utilisées par leurs adversaires », avait porté ses fruits. Et c’est précisément pour cette raison que Divino afflante Spiritu se montre moins préoccupée que Providentissimus Deus par le combat contre les positions de l’exégèse rationaliste.

Divino afflante Spiritu a particulièrement recommandé aux exégètes l’étude des genres littéraires utilisés dans les Livres Saints, en allant jusqu’à dire que l’exégèse catholique doit « acquérir la conviction que cette partie de sa tâche ne peut pas être négligée sans grave dommage pour l’exégèse catholique »[14]. Cette recommandation part du souci de comprendre le sens des textes avec toute l’exactitude et la précision possibles et, donc, dans leur contexte culturel historique. Une fausse idée de Dieu et de l’Incarnation pousse un certain nombre de chrétiens à prendre une orientation opposée. Ils ont tendance à croire que, Dieu étant l’Être absolu, chacune de ses paroles a une valeur absolue, indépendante de tous les conditionnements du langage humain. Il n’y a donc pas lieu, selon eux, d’étudier ces conditionnements pour opérer des distinctions qui relativiseraient la portée des paroles. Mais c’est là se faire illusion et refuser, en réalité, les mystères de l’inspiration scripturaire et de l’Incarnation, en s’attachant à une fausse notion de l’Absolu. Le Dieu de la Bible n’est pas un Être absolu qui, écrasant tout ce qu’il touche, supprimerait toutes les différences et toutes les nuances. Il est au contraire le Dieu créateur, qui a créé l’étonnante variété des êtres « chacun selon son espèce », comme le dit et le répète le récit de la Genèse. Loin d’anéantir les différences, Dieu les respecte et les valorise. Lorsqu’il s’exprime dans un langage humain, il ne donne pas à chaque expression une valeur uniforme, mais il en utilise les nuances possibles avec une souplesse extrême et il en accepte également les limitations. C’est ce qui rend la tâche des exégètes si complexe, si nécessaire et si passionnante ! Aucun des aspects humains du langage ne peut être négligé. Les progrès récents des recherches linguistiques, littéraires et herméneutiques ont amené l’exégèse biblique à ajouter à l’étude des genres littéraires beaucoup d’autres points de vue (rhétorique, narratif, structuraliste) ; d’autres sciences humaines, comme la psychologie et la sociologie, ont également été mises à contribution.