Le Dieu de la Bible ne cesse d’appeler. N’est-il pas le Dieu des relations? On peut même dire que son nom est « relation », car c’est lui qui donne l’être et qui fait vivre les autres, tous les autres. Il se révèle par sa parole, c’est dire qu’il veut être entendu par d’autres. La parole n’est-elle pas toujours adressée? Mais lorsqu’il parle, lorsqu’il appelle, il se risque à toutes sortes de réactions et de réponses. Il se risque à un « non », comme cela est arrivé avec Jonas. Il rencontre de la résistance, comme avec Moïse ou avec le jeune homme riche. Il se peut qu’il voie souffrir celui qu’il destine à une grande mission, tel Jérémie. Il se peut même que Dieu ne soit pas immédiatement entendu et compris, tel le petit Samuel, ou tel Elie à l’Horeb peinant à discerner la présence divine dans « la voix de fin silence ». Enfin, il se peut aussi que l’appel de Dieu soit immédiatement suivi, comme ce fut le cas de Matthieu. Explorons cette scène ensemble!

Etant sorti, Jésus vit, en passant, un homme assis au bureau de la douane, appelé Matthieu, et il lui dit : “Suis-moi !” Et, se levant, il le suivit. » (Mt 9, 9)

L’appel de Matthieu, Caravaggio, 1599-1600, Rome, Saint Louis des Français

Le Caravage était un homme aux mœurs contestables. Pourtant, il avait compris quelque chose de la gratuité de l’amour de Dieu pour les hommes. Il avait saisi à quel point Dieu pouvait et voulait faire de l’homme un saint.

Cette peinture représente l’instant même entre l’invitation « suis-moi » et le mouvement de se lever. C’est le moment où la volonté va transmettre au corps la décision de se lever. Cet instant très bref a eu un avant et il aura un après.

Observons les vêtements: les cinq personnages de gauche sont habillés à la mode du 17è siècle, c’est-à-dire au temps du Caravage. Tandis que Jésus et Pierre sont habillés comme au premier siècle. C’est une belle manière de dire que Jésus nous rejoint dans notre présent. Qu’il n’appartient pas au passé !

Observons l’organisation de l’espace : à gauche, le groupe est en demi-cercle avec une place laissée libre au milieu. Pour qui est cette place ? Pour l’observateur. Nous sommes donc invités à entrer dans le cercle des appelés!

Ces hommes sont riches, car ils savent compter. Essayons de décrire l’attitude de chacun :

  • Celui de gauche est tout absorbé dans son argent.
  • Celui qui est debout, est-il en train de surveiller ?
  • Les deux jeunes à droite sont comme piqués par la curiosité.
  • Il n’y a que Matthieu pour recevoir et vivre cet événement « pour lui ».

Observons la lumière: elle vient de droite et va vers la gauche. De plus haut que le Christ. Elle vient donc du Père. La lumière atteint tous les visages, car

« votre Père qui est aux cieux fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. » (Mt 5,45)

Même si la lumière atteint aussi le dernier à gauche, il reste dans l’ombre, car il est totalement absorbé par son argent. L’appel de Dieu est imperceptible pour lui, car il n’est pas disposé à l’entendre. Il est trop absorbé par d’autres choses. D’ailleurs, le cordon de la bourse a la forme d’une araignée…

La fenêtre semble totalement inutile, puisqu’elle ne donne aucune lumière. Elle représente plutôt la croix.

La lumière est comme le manteau de Pierre. Pourquoi cette insistance sur le manteau de Pierre ? Peut-être en référence aux Actes des Apôtres quand il est dit que les malades voulaient être recouvertes par l’ombre de Pierre qui avait le pouvoir de guérir…

à tel point qu’on allait jusqu’à transporter les malades dans les rues et les déposer là sur des lits et des grabats, afin que tout au moins l’ombre de Pierre, à son passage, couvrît l’un d’eux. La multitude accourait même des villes voisines de Jérusalem, apportant des malades et des gens possédés par des esprits impurs et tous étaient guéris. » (Ac 5, 15‑16)

Il semble que Pierre, représentant de l’Eglise, soit le reflet de la lumière même du Christ.

Regardons les destinataires de l’appel de Jésus et de l’Eglise: puisque le peintre ne peut pas employer la parole, on ne reconnaît l’appel que dans l’auto désignation de Matthieu. Cela a un enseignement. En voyant l’appel de l’autre, on est capable de percevoir l’appel de Dieu. Personne ne peut dire « toi, Dieu t’appelle ». C’est celui qui est appelé qui seul le sait et lorsqu’il répond positivement à l’appel de Dieu alors il devient un témoin de l’appel de Dieu. De sorte que les autres déchiffrent leur propre appel grâce au oui que d’autres ont donné avant eux.

Alors qu’ils sont trois à avoir vu la main du Christ se tendre vers eux, seul Matthieu y a lu un appel. Lui seul s’est demandé : « Est-ce pour moi ? »

Pierre et Jésus sont difficiles à distinguer. La main de Jésus et celle de Pierre font le même geste, même si Pierre le fait plus timidement. Une façon de dire que l’appel de Jésus est relayé par l’Eglise avec et malgré toutes ses obscurités.

La main de Jésus, comme celle de Pierre, est celle qu’on voit dans la scène de création de Michel-Ange. Mais, attention, il ne s’agit pas de la main du Père, mais bien de celle d’Adam. D’une part, Jésus est le nouvel Adam. Et d’autre part, cela nous dit que l’appel de Jésus à le suivre, la vie dans le baptême, est une nouvelle création, une nouvelle naissance.

Enfin, arrêtons-nous sur le très beau visage de Jésus, sur son regard:

Jésus posa son regard sur lui, et il l’aima. (Mc 10,21)

Le Dieu de la Bible ne cesse d’appeler. N’est-il pas le Dieu des relations? On peut même dire que son nom est « relation », car c’est lui qui donne l’être et qui fait vivre les autres, tous les autres. Il se révèle par sa parole, c’est dire qu’il veut être entendu par d’autres. La parole n’est-elle pas toujours adressée? Mais lorsqu’il parle, lorsqu’il appelle, il se risque à toutes sortes de réactions et de réponses. Il se risque à un « non », comme cela est arrivé avec Jonas. Il rencontre de la résistance, comme avec Moïse ou avec le jeune homme riche. Il se peut qu’il voie souffrir celui qu’il destine à une grande mission, tel Jérémie. Il se peut même que Dieu ne soit pas immédiatement entendu et compris, tel le petit Samuel, ou tel Elie à l’Horeb peinant à discerner la présence divine dans « la voix de fin silence ». Enfin, il se peut aussi que l’appel de Dieu soit immédiatement suivi, comme ce fut le cas de Matthieu. Explorons cette scène ensemble!

Etant sorti, Jésus vit, en passant, un homme assis au bureau de la douane, appelé Matthieu, et il lui dit : “Suis-moi !” Et, se levant, il le suivit. » (Mt 9, 9)

L’appel de Matthieu, Caravaggio, 1599-1600, Rome, Saint Louis des Français

Le Caravage était un homme aux mœurs contestables. Pourtant, il avait compris quelque chose de la gratuité de l’amour de Dieu pour les hommes. Il avait saisi à quel point Dieu pouvait et voulait faire de l’homme un saint.

Cette peinture représente l’instant même entre l’invitation « suis-moi » et le mouvement de se lever. C’est le moment où la volonté va transmettre au corps la décision de se lever. Cet instant très bref a eu un avant et il aura un après.

Observons les vêtements: les cinq personnages de gauche sont habillés à la mode du 17è siècle, c’est-à-dire au temps du Caravage. Tandis que Jésus et Pierre sont habillés comme au premier siècle. C’est une belle manière de dire que Jésus nous rejoint dans notre présent. Qu’il n’appartient pas au passé !

Observons l’organisation de l’espace : à gauche, le groupe est en demi-cercle avec une place laissée libre au milieu. Pour qui est cette place ? Pour l’observateur. Nous sommes donc invités à entrer dans le cercle des appelés!

Ces hommes sont riches, car ils savent compter. Essayons de décrire l’attitude de chacun :

  • Celui de gauche est tout absorbé dans son argent.
  • Celui qui est debout, est-il en train de surveiller ?
  • Les deux jeunes à droite sont comme piqués par la curiosité.
  • Il n’y a que Matthieu pour recevoir et vivre cet événement « pour lui ».

Observons la lumière: elle vient de droite et va vers la gauche. De plus haut que le Christ. Elle vient donc du Père. La lumière atteint tous les visages, car

« votre Père qui est aux cieux fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. » (Mt 5,45)

Même si la lumière atteint aussi le dernier à gauche, il reste dans l’ombre, car il est totalement absorbé par son argent. L’appel de Dieu est imperceptible pour lui, car il n’est pas disposé à l’entendre. Il est trop absorbé par d’autres choses. D’ailleurs, le cordon de la bourse a la forme d’une araignée…

La fenêtre semble totalement inutile, puisqu’elle ne donne aucune lumière. Elle représente plutôt la croix.

La lumière est comme le manteau de Pierre. Pourquoi cette insistance sur le manteau de Pierre ? Peut-être en référence aux Actes des Apôtres quand il est dit que les malades voulaient être recouvertes par l’ombre de Pierre qui avait le pouvoir de guérir…

à tel point qu’on allait jusqu’à transporter les malades dans les rues et les déposer là sur des lits et des grabats, afin que tout au moins l’ombre de Pierre, à son passage, couvrît l’un d’eux. La multitude accourait même des villes voisines de Jérusalem, apportant des malades et des gens possédés par des esprits impurs et tous étaient guéris. » (Ac 5, 15‑16)

Il semble que Pierre, représentant de l’Eglise, soit le reflet de la lumière même du Christ.

Regardons les destinataires de l’appel de Jésus et de l’Eglise: puisque le peintre ne peut pas employer la parole, on ne reconnaît l’appel que dans l’auto désignation de Matthieu. Cela a un enseignement. En voyant l’appel de l’autre, on est capable de percevoir l’appel de Dieu. Personne ne peut dire « toi, Dieu t’appelle ». C’est celui qui est appelé qui seul le sait et lorsqu’il répond positivement à l’appel de Dieu alors il devient un témoin de l’appel de Dieu. De sorte que les autres déchiffrent leur propre appel grâce au oui que d’autres ont donné avant eux.

Alors qu’ils sont trois à avoir vu la main du Christ se tendre vers eux, seul Matthieu y a lu un appel. Lui seul s’est demandé : « Est-ce pour moi ? »

Pierre et Jésus sont difficiles à distinguer. La main de Jésus et celle de Pierre font le même geste, même si Pierre le fait plus timidement. Une façon de dire que l’appel de Jésus est relayé par l’Eglise avec et malgré toutes ses obscurités.

La main de Jésus, comme celle de Pierre, est celle qu’on voit dans la scène de création de Michel-Ange. Mais, attention, il ne s’agit pas de la main du Père, mais bien de celle d’Adam. D’une part, Jésus est le nouvel Adam. Et d’autre part, cela nous dit que l’appel de Jésus à le suivre, la vie dans le baptême, est une nouvelle création, une nouvelle naissance.

Enfin, arrêtons-nous sur le très beau visage de Jésus, sur son regard:

Jésus posa son regard sur lui, et il l’aima. (Mc 10,21)