Isaïe était un prophète visionnaire. Le chap. 6 du livre qui porte son nom rapporte une vision grandiose qui marque le point de départ de la mission du prophète Isaïe. Qu’a-t-il donc vu?

01 L’année de la mort du roi Ozias, je vis le Seigneur qui siégeait sur un trône très élevé ; les pans de son manteau remplissaient le Temple. 02 Des séraphins se tenaient au-dessus de lui. Ils avaient chacun six ailes : deux pour se couvrir le visage, deux pour se couvrir les pieds, et deux pour voler. 03 Ils se criaient l’un à l’autre : « Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur de l’univers ! Toute la terre est remplie de sa gloire. » 04 Les pivots des portes se mirent à trembler à la voix de celui qui criait, et le Temple se remplissait de fumée. 05 Je dis alors : « Malheur à moi ! je suis perdu, car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures : et mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers ! » 06 L’un des séraphins vola vers moi, tenant un charbon brûlant qu’il avait pris avec des pinces sur l’autel. 07 Il l’approcha de ma bouche et dit : « Ceci a touché tes lèvres, et maintenant ta faute est enlevée, ton péché est pardonné. » 08 J’entendis alors la voix du Seigneur qui disait : « Qui enverrai-je ? qui sera notre messager ? » Et j’ai répondu : « Me voici : envoie-moi ! » (Isaïe 6,1-8)
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Vision d’Isaïe, selon Is 6. Marc Chagall

Les prophètes ont le plus souvent exercé leur ministère de la parole à la cour des rois. C’est bien le cas d’Isaïe qui a travaillé comme conseiller de quatre rois, sur une période d’environ quarante ans. Son ministère a donc été plutôt long:

VISION D’ISAÏE, fils d’Amots, – ce qu’il a vu au sujet de Juda et de Jérusalem, au temps d’Ozias, de Yotam, d’Acaz et d’Ézékias, rois de Juda. (Is 1,1)

Ces quatre rois ont vécu au cours du passionnant et difficile 8ème siècle av. J.-C., alors que le petit royaume de Juda était ballotté entre différents conflits opposant parfois les grandes puissances comme l’Assyrie et l’Égypte, parfois les conflits plus locaux avec le royaume d’Israël et le royaume d’Aram. Le conseil d’un vrai prophète comme l’était Isaïe était un appui de grande valeur dans ce contexte où les décisions politiques pouvaient être décisives, pour le meilleur comme pour le pire. Le nom-même du prophète Isaïe – YESHAYAHOU – dit quelque chose de la mission de l’homme de Dieu. Son nom est un nom théophore qui signifie: « Yahvé sauve ». C’est donc pour le salut de son peuple qu’Isaïe est choisi et envoyé par Dieu.

Les circonstances de son appel sont évoquées au chap. 6 qu’on vient de lire. Lors d’une vision, Isaïe voit le Seigneur. Voir Dieu est un privilège dont peu de personnages bibliques ont bénéficié, comme Moïse par exemple. Mais Isaïe voit Dieu en un lieu bien particulier: dans le Temple. Dieu est assis sur un trône élevé, à la manière d’un roi. C’est d’ailleurs ainsi qu’Isaïe qualifie Dieu:

Mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers !

Oui, le Seigneur est le roi véritable d’Israël. Isaïe est bien placé pour savoir que les rois humains sont faibles et sont souvent des hommes de peu de foi.

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Salle du trône de Salomon, visite de la reine de Saba. Edward John Poynter, vers 1900.

Les pans du manteau de Dieu remplissent le Temple. La description porte plus sur les accessoires de Dieu que sur Dieu lui-même: on évoque la hauteur de son trône et l’immensité de son manteau. Rien d’étonnant à cela, car qui pourrait décrire Dieu avec des mots? Qui pourrait dire l’indicible?

Dire l’indicible, voilà la tâche des séraphins. Ils constituent l’armée céleste qui entoure le trône divin. Dieu est d’ailleurs appelé « Yahvé Sabaoth » dans ce texte d’Isaïe, ce qui signifie « Dieu des armées célestes », dont les soldats sont les anges, les archanges, les chérubins et les séraphins, ces mystérieuses créatures ailées. Ensemble ils entonnent un chant :

Ils se criaient l’un à l’autre : « Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur de l’univers ! Toute la terre est remplie de sa gloire. »

Ce refrain- vieux d’au moins 28 siècles -, qu’on appelle Trisagion (=trois fois saint) est passé dans notre liturgie chrétienne. La sainteté évoque la séparation: Dieu est celui qui est totalement « séparé ». c’est-à-dire « autre » que nous, les hommes. Il ne se confond pas avec nous. Il est le tout-autre. Nous n’adorons pas une idole fabriquée par nos propres mains, mais le Dieu sur lequel nous n’aurons jamais la main mise, le Dieu qui nous précède toujours, le Dieu incomparable. Chanter sa sainteté, c’est chanter qu’il est Dieu et non homme.

cambridge-corpus-christi-college-ms-66-f-100-xiie-siecle
Cambridge, Corpus Christi College, ms 66, f° 100, XIIe siècle.
londres-british-library-ms-3244-f-28v-vers-1236
Londres, British Library, ms 3244, f° 28v, vers 1236.
sacramentarium-dit-sacramentaire-de-drogon-bnf
Sacramentarium, dit Sacramentaire de Drogon, BNF.

Séraphins à six ailes, selon la description d’Isaïe 6.

O Toi, l’au-delà de tout. Comment t’appeler d’un autre nom ? Quelle hymne peut te chanter ? Aucun mot ne t’exprime. Quel esprit te saisir? Nulle intelligence ne te conçoit. Seul, tu es ineffable. Tout ce qui se dit est sorti de toi. Tous les êtres te célèbrent. Ceux qui te parlent et ceux qui sont muets. Tous les êtres te rendent hommage. Ceux qui pensent comme ceux qui ne pensent pas. L’universel désir, le gémissement de tous aspire vers toi. Tout ce qui existe te prie. Et vers toi tout être qui sait lire ton univers fait monter un hymne de silence. Tout ce qui demeure, demeure en toi seul. Le mouvement de l’univers déferle en toi. De tous les êtres tu es la fin. Tu es unique. Tu es chacun et tu n’es aucun. Tu n’es pas un être seul, tu n’es pas l’ensemble. Tu as tous les noms. Comment t’appellerais-je ? Toi, le seul qu’on ne peut nommer. Quel esprit céleste pourra pénétrer les nuées qui voilent le ciel lui-même ? Aie pitié, ô toi, l’au-delà de tout. Comment t’appeler d’un autre nom ? (Hymne attribué à saint Grégoire de Nazianze)

Au son de ce Trisagion, le Temple se mit à trembler et il se remplit de fumée. L’allusion à la vision de Dieu par Moïse sur la montagne du Sinaï est claire:

18 La montagne du Sinaï était toute fumante, car le Seigneur y était descendu dans le feu ; la fumée montait, comme la fumée d’une fournaise, et toute la montagne tremblait violemment. 19 La sonnerie du cor était de plus en plus puissante. Moïse parlait, et la voix de Dieu lui répondait. 20 Le Seigneur descendit sur le sommet du Sinaï, il appela Moïse sur le sommet de la montagne, et Moïse monta vers lui. 21 Le Seigneur dit à Moïse : « Descends et avertis le peuple de ne pas se précipiter pour voir le Seigneur, car beaucoup d’entre eux périraient. (Exode 19,18-21)

Déjà au temps de Moïse, la manifestation divine était accompagnée de ces signes grandioses: tremblement de terre et fumée.

Isaïe réagit par la crainte, une crainte qui n’est pas angoisse, mais plutôt infini respect pour Dieu, infini respect pour sa sainteté :

« Malheur à moi ! je suis perdu, car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures : et mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers ! »

Personne ne peut voir Dieu sans mourir et Isaïe le sait. L’homme pécheur ne peut accéder à la sainteté divine, que si Dieu le lui permet. Et c’est bien cela qui se passe: un séraphin s’approche pour purifier les lèvres impures d’Isaïe et pour le rendre digne et apte à la mission de prophète. Le voilà pardonné et purifié. Isaïe ne mourra pas d’avoir vu Dieu.

La bouche d’Isaïe est désormais prête pour transmettre la Parole divine:

J’entendis alors la voix du Seigneur qui disait : « Qui enverrai-je ? qui sera notre messager ? » Et j’ai répondu : « Me voici : envoie-moi ! »

Isaïe répond « me voici » à l’appel de Dieu, ce qui ne va pas sans rappeler la vocation d’un autre prophète en Israël, celle du petit Samuel:

01 Le jeune Samuel assurait le service du Seigneur en présence du prêtre Éli. La parole du Seigneur était rare en ces jours-là, et la vision, peu répandue. 03 La lampe de Dieu n’était pas encore éteinte. Samuel était couché dans le temple du Seigneur, où se trouvait l’arche de Dieu. 04 Le Seigneur appela Samuel, qui répondit : « Me voici ! » 05 Il courut vers le prêtre Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Éli répondit : « Je n’ai pas appelé. Retourne te coucher. » L’enfant alla se coucher. 06 De nouveau, le Seigneur appela Samuel. Et Samuel se leva. Il alla auprès d’Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Éli répondit : « Je n’ai pas appelé, mon fils. Retourne te coucher. » 07 Samuel ne connaissait pas encore le Seigneur, et la parole du Seigneur ne lui avait pas encore été révélée. 08 De nouveau, le Seigneur appela Samuel. Celui-ci se leva. Il alla auprès d’Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Alors Éli comprit que c’était le Seigneur qui appelait l’enfant, 09 et il lui dit : « Va te recoucher, et s’il t’appelle, tu diras : “Parle, Seigneur, ton serviteur écoute.” » Samuel alla se recoucher à sa place habituelle. 10 Le Seigneur vint, il se tenait là et il appela comme les autres fois : « Samuel ! Samuel ! » Et Samuel répondit : « Parle, ton serviteur écoute. » (1 Samuel 3,1-10)
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Samuel enfant par Joshua Reynolds, 1776 (musée Fabre, Montpellier).

Comme Samuel, Isaïe a répondu: « envoie-moi ». Le voilà donc institué « messager » du Seigneur. Le message qu’il aura à annoncer au roi et au peuple ne sera pas facile à entendre. Les temps étaient difficiles. Il fallait bien une vision du Dieu vivant pour le préparer à sa mission.

Isaïe était un prophète visionnaire. Le chap. 6 du livre qui porte son nom rapporte une vision grandiose qui marque le point de départ de la mission du prophète Isaïe. Qu’a-t-il donc vu?

01 L’année de la mort du roi Ozias, je vis le Seigneur qui siégeait sur un trône très élevé ; les pans de son manteau remplissaient le Temple. 02 Des séraphins se tenaient au-dessus de lui. Ils avaient chacun six ailes : deux pour se couvrir le visage, deux pour se couvrir les pieds, et deux pour voler. 03 Ils se criaient l’un à l’autre : « Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur de l’univers ! Toute la terre est remplie de sa gloire. » 04 Les pivots des portes se mirent à trembler à la voix de celui qui criait, et le Temple se remplissait de fumée. 05 Je dis alors : « Malheur à moi ! je suis perdu, car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures : et mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers ! » 06 L’un des séraphins vola vers moi, tenant un charbon brûlant qu’il avait pris avec des pinces sur l’autel. 07 Il l’approcha de ma bouche et dit : « Ceci a touché tes lèvres, et maintenant ta faute est enlevée, ton péché est pardonné. » 08 J’entendis alors la voix du Seigneur qui disait : « Qui enverrai-je ? qui sera notre messager ? » Et j’ai répondu : « Me voici : envoie-moi ! » (Isaïe 6,1-8)
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Vision d’Isaïe, selon Is 6. Marc Chagall

Les prophètes ont le plus souvent exercé leur ministère de la parole à la cour des rois. C’est bien le cas d’Isaïe qui a travaillé comme conseiller de quatre rois, sur une période d’environ quarante ans. Son ministère a donc été plutôt long:

VISION D’ISAÏE, fils d’Amots, – ce qu’il a vu au sujet de Juda et de Jérusalem, au temps d’Ozias, de Yotam, d’Acaz et d’Ézékias, rois de Juda. (Is 1,1)

Ces quatre rois ont vécu au cours du passionnant et difficile 8ème siècle av. J.-C., alors que le petit royaume de Juda était ballotté entre différents conflits opposant parfois les grandes puissances comme l’Assyrie et l’Égypte, parfois les conflits plus locaux avec le royaume d’Israël et le royaume d’Aram. Le conseil d’un vrai prophète comme l’était Isaïe était un appui de grande valeur dans ce contexte où les décisions politiques pouvaient être décisives, pour le meilleur comme pour le pire. Le nom-même du prophète Isaïe – YESHAYAHOU – dit quelque chose de la mission de l’homme de Dieu. Son nom est un nom théophore qui signifie: « Yahvé sauve ». C’est donc pour le salut de son peuple qu’Isaïe est choisi et envoyé par Dieu.

Les circonstances de son appel sont évoquées au chap. 6 qu’on vient de lire. Lors d’une vision, Isaïe voit le Seigneur. Voir Dieu est un privilège dont peu de personnages bibliques ont bénéficié, comme Moïse par exemple. Mais Isaïe voit Dieu en un lieu bien particulier: dans le Temple. Dieu est assis sur un trône élevé, à la manière d’un roi. C’est d’ailleurs ainsi qu’Isaïe qualifie Dieu:

Mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers !

Oui, le Seigneur est le roi véritable d’Israël. Isaïe est bien placé pour savoir que les rois humains sont faibles et sont souvent des hommes de peu de foi.

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Salle du trône de Salomon, visite de la reine de Saba. Edward John Poynter, vers 1900.

Les pans du manteau de Dieu remplissent le Temple. La description porte plus sur les accessoires de Dieu que sur Dieu lui-même: on évoque la hauteur de son trône et l’immensité de son manteau. Rien d’étonnant à cela, car qui pourrait décrire Dieu avec des mots? Qui pourrait dire l’indicible?

Dire l’indicible, voilà la tâche des séraphins. Ils constituent l’armée céleste qui entoure le trône divin. Dieu est d’ailleurs appelé « Yahvé Sabaoth » dans ce texte d’Isaïe, ce qui signifie « Dieu des armées célestes », dont les soldats sont les anges, les archanges, les chérubins et les séraphins, ces mystérieuses créatures ailées. Ensemble ils entonnent un chant :

Ils se criaient l’un à l’autre : « Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur de l’univers ! Toute la terre est remplie de sa gloire. »

Ce refrain- vieux d’au moins 28 siècles -, qu’on appelle Trisagion (=trois fois saint) est passé dans notre liturgie chrétienne. La sainteté évoque la séparation: Dieu est celui qui est totalement « séparé ». c’est-à-dire « autre » que nous, les hommes. Il ne se confond pas avec nous. Il est le tout-autre. Nous n’adorons pas une idole fabriquée par nos propres mains, mais le Dieu sur lequel nous n’aurons jamais la main mise, le Dieu qui nous précède toujours, le Dieu incomparable. Chanter sa sainteté, c’est chanter qu’il est Dieu et non homme.

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Cambridge, Corpus Christi College, ms 66, f° 100, XIIe siècle.
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Londres, British Library, ms 3244, f° 28v, vers 1236.
sacramentarium-dit-sacramentaire-de-drogon-bnf
Sacramentarium, dit Sacramentaire de Drogon, BNF.

Séraphins à six ailes, selon la description d’Isaïe 6.

O Toi, l’au-delà de tout. Comment t’appeler d’un autre nom ? Quelle hymne peut te chanter ? Aucun mot ne t’exprime. Quel esprit te saisir? Nulle intelligence ne te conçoit. Seul, tu es ineffable. Tout ce qui se dit est sorti de toi. Tous les êtres te célèbrent. Ceux qui te parlent et ceux qui sont muets. Tous les êtres te rendent hommage. Ceux qui pensent comme ceux qui ne pensent pas. L’universel désir, le gémissement de tous aspire vers toi. Tout ce qui existe te prie. Et vers toi tout être qui sait lire ton univers fait monter un hymne de silence. Tout ce qui demeure, demeure en toi seul. Le mouvement de l’univers déferle en toi. De tous les êtres tu es la fin. Tu es unique. Tu es chacun et tu n’es aucun. Tu n’es pas un être seul, tu n’es pas l’ensemble. Tu as tous les noms. Comment t’appellerais-je ? Toi, le seul qu’on ne peut nommer. Quel esprit céleste pourra pénétrer les nuées qui voilent le ciel lui-même ? Aie pitié, ô toi, l’au-delà de tout. Comment t’appeler d’un autre nom ? (Hymne attribué à saint Grégoire de Nazianze)

Au son de ce Trisagion, le Temple se mit à trembler et il se remplit de fumée. L’allusion à la vision de Dieu par Moïse sur la montagne du Sinaï est claire:

18 La montagne du Sinaï était toute fumante, car le Seigneur y était descendu dans le feu ; la fumée montait, comme la fumée d’une fournaise, et toute la montagne tremblait violemment. 19 La sonnerie du cor était de plus en plus puissante. Moïse parlait, et la voix de Dieu lui répondait. 20 Le Seigneur descendit sur le sommet du Sinaï, il appela Moïse sur le sommet de la montagne, et Moïse monta vers lui. 21 Le Seigneur dit à Moïse : « Descends et avertis le peuple de ne pas se précipiter pour voir le Seigneur, car beaucoup d’entre eux périraient. (Exode 19,18-21)

Déjà au temps de Moïse, la manifestation divine était accompagnée de ces signes grandioses: tremblement de terre et fumée.

Isaïe réagit par la crainte, une crainte qui n’est pas angoisse, mais plutôt infini respect pour Dieu, infini respect pour sa sainteté :

« Malheur à moi ! je suis perdu, car je suis un homme aux lèvres impures, j’habite au milieu d’un peuple aux lèvres impures : et mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers ! »

Personne ne peut voir Dieu sans mourir et Isaïe le sait. L’homme pécheur ne peut accéder à la sainteté divine, que si Dieu le lui permet. Et c’est bien cela qui se passe: un séraphin s’approche pour purifier les lèvres impures d’Isaïe et pour le rendre digne et apte à la mission de prophète. Le voilà pardonné et purifié. Isaïe ne mourra pas d’avoir vu Dieu.

La bouche d’Isaïe est désormais prête pour transmettre la Parole divine:

J’entendis alors la voix du Seigneur qui disait : « Qui enverrai-je ? qui sera notre messager ? » Et j’ai répondu : « Me voici : envoie-moi ! »

Isaïe répond « me voici » à l’appel de Dieu, ce qui ne va pas sans rappeler la vocation d’un autre prophète en Israël, celle du petit Samuel:

01 Le jeune Samuel assurait le service du Seigneur en présence du prêtre Éli. La parole du Seigneur était rare en ces jours-là, et la vision, peu répandue. 03 La lampe de Dieu n’était pas encore éteinte. Samuel était couché dans le temple du Seigneur, où se trouvait l’arche de Dieu. 04 Le Seigneur appela Samuel, qui répondit : « Me voici ! » 05 Il courut vers le prêtre Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Éli répondit : « Je n’ai pas appelé. Retourne te coucher. » L’enfant alla se coucher. 06 De nouveau, le Seigneur appela Samuel. Et Samuel se leva. Il alla auprès d’Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Éli répondit : « Je n’ai pas appelé, mon fils. Retourne te coucher. » 07 Samuel ne connaissait pas encore le Seigneur, et la parole du Seigneur ne lui avait pas encore été révélée. 08 De nouveau, le Seigneur appela Samuel. Celui-ci se leva. Il alla auprès d’Éli, et il dit : « Tu m’as appelé, me voici. » Alors Éli comprit que c’était le Seigneur qui appelait l’enfant, 09 et il lui dit : « Va te recoucher, et s’il t’appelle, tu diras : “Parle, Seigneur, ton serviteur écoute.” » Samuel alla se recoucher à sa place habituelle. 10 Le Seigneur vint, il se tenait là et il appela comme les autres fois : « Samuel ! Samuel ! » Et Samuel répondit : « Parle, ton serviteur écoute. » (1 Samuel 3,1-10)
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Samuel enfant par Joshua Reynolds, 1776 (musée Fabre, Montpellier).

Comme Samuel, Isaïe a répondu: « envoie-moi ». Le voilà donc institué « messager » du Seigneur. Le message qu’il aura à annoncer au roi et au peuple ne sera pas facile à entendre. Les temps étaient difficiles. Il fallait bien une vision du Dieu vivant pour le préparer à sa mission.